Le Haut Conseil à l’Egalité publie, ce jour, le deuxième état des lieux du sexisme en France, obligation annuelle depuis la loi du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et la citoyenneté.
En dépit d’une forte mobilisation de la société civile avec le phénomène #Metoo et de la tenue du Grenelle contre les violences conjugales, le constat reste accablant : une hausse de 46% des plaintes pour harcèlement sexuel en 2019 et les mis en cause pour des crimes et délits à caractère sexiste sont très majoritairement des hommes : toutes infractions pénales confondues, 87 % des victimes d’actes sexistes, enregistrées par les forces de l’ordre, sont des femmes et 91 % des mis en cause sont des hommes.
Trois domaines ont été plus spécifiquement analysés par la commission stéréotypes du HCE présidée par Sylvie PIERRE-BROSSOLETTE : celui du monde du travail, d’abord en amont dans les grandes écoles, sortes de bastions « virilistes » où les actes sexistes fonctionnent comme rite intégrateur, et dans les entreprises où règne une grande tolérance sociale au sexisme, malgré les avancées du droit et des initiatives notables : 60 % des Européennes déclarent en 2019, avoir déjà été victimes d’au moins une forme de violence sexiste ou sexuelle au cours de leur carrière et en France, dans une enquête de 2016, près de 80 % des femmes considéraient qu’elles étaient régulièrement confrontées à des attitudes ou des décisions sexistes dans l’entreprise.
Celui des médias où l’image des femmes est toujours décalée par rapport à la réalité. La part des femmes à la télévision est de 42 % en 2019 et n’est plus que de 29 % aux heures de grande écoute. Dans les émissions de divertissement, notamment de téléréalité, les traits de caractère et les assignations à des tâches et rôles sociaux de sexe sont stéréotypés, ; le dénigrement et la disqualification des femmes sont toujours présents de même qu’une hyper sexualisation sans lien avec le sujet traité.
Quant au milieu politique, il demeure un bastion majeur du sexisme et fonctionne comme une chasse-gardée des hommes : les femmes politiques y sont considérées comme des intruses, sujettes à des disqualifications et incivilités, des comportements paternalistes et confrontées aux violences sexistes et sexuelles. Malgré les lois de parité, le pouvoir reste très majoritairement masculin : 84% des maires et 92% des président.es d’intercommunalité sont des hommes.
Face à ces constats, le Haut Conseil à l’égalité formule 32 recommandations parmi lesquelles :
- Dans le monde du travail, intégrer le thème des violences sexistes et sexuelles dans la négociation collective obligatoire sur l’égalité professionnelle et renforcer les exigences en matière d’évaluation, de formation et de transparence, notamment sur le nombre et la nature des sanctions prises par l’employeur ou l’employeuse ;
- Dans le cadre du projet de loi sur l’audiovisuel, afin d’assurer une meilleure image et représentation des femmes dans les médias, renforcer le rôle du CSA pour imposer à chaque chaîne de progresser annuellement, à la fois sur la présence des femmes à l’antenne par type de vecteur et heure d’audience, mais aussi sur la diminution des stéréotypes dans leurs programmes, ainsi que l’inclusion d’une disposition permettant une régulation des contenus sur les plateformes numériques.
- Dans le monde politique, mettre en place des règles paritaires pour les communes de moins de 1000 habitant.es, pour les exécutifs locaux et intercommunaux, mais aussi dans les postes de vice présidences des assemblées parlementaires et parmi celles et ceux qui rapportent les projets et propositions de loi. Il convient également de demander une peine d’inégibilité pour les elu.es condamné.es pour violences sexistes ou sexuelles.
Selon Brigitte Grésy, présidente du HCE : « Le sexisme fait système et est présent dans le quotidien des femmes. Il y a urgence à rendre visible et à forger des outils dans tous les domaines, afin de le faire reculer. »